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Paris sous les crayons, expo

Cette semaine, pas moins de cinq manifestations autour du dessin quadrillent la capitale. On l’entend beaucoup : le dessin, c’est une façon d’accéder à l’art à moindre frais. Effet de mode ? Renaissance ? Mutation ? Voici quelques clés pour comprendre le phénomène et, pourquoi pas, réaliser le parcours parfait du collectionneur en herbe !

Nous avons mis le dessin à la mode ! », s’enthousiasme Christine Phal, toute réjouie de la sédentarisation du Salon du dessin contemporain qu’elle a crée voici quatre ans et qui, après des années de nomadisme, prend ses quartiers, et sans doute ses lettres de noblesse, au Carrousel du Louvre. Et si ce salon n’est pas uniquement à l’origine de l’engouement dont ce médium artistique fait l’objet, il lui a sans aucun doute offert une place accrue au sein du marché de l’art. Le phénomène est en fait porté par des signes nombreux. Ça commence dans les facultés de Beaux-Arts. « Dans mon cursus, il n’y avait pas de dessin », raconte Emmanuelle, ancienne étudiante en art. « Les Beaux-Arts de Paris sont les seuls à avoir continué à imposer l’étude obligatoire du dessin les deux premières années », renchérit Bernard Moninot, artiste, professeur aux Beaux-Arts de Paris, justement, et co-commissaire de l’exposition Lignes de chance, actualité du dessin contemporain à la Fondation d’entreprise Ricard pour l’art contemporain. « Dans d’autres facs, certains élèves refusaient tout bonnement de dessiner. Mais tout cela est en train de changer. » Il y a aussi “Roven”, une nouvelle revue d’art consacrée à 100 % au dessin, qui a vu le jour en 2009. « L’idée, raconte Johana Carrier, co-fondatrice de la revue, était de proposer, au moment où le marché s’ouvre de plus en plus à ce medium, un support critique qui n’existait pas. » C’est à peu près au même moment que Jean-Roch Dard a ouvert une fort jolie galerie dans le Marais, entièrement consacrée au dessin contemporain, et qui propose des expositions délicieuses de fraîcheur, de créativité et d’insolence. Plus loin de l’art, la revue “XXI”, entièrement dédiée aux grands reportages, et qui a connu un succès étonnant depuis sa création, voici deux ans, propose même dans chaque numéro tout un reportage en bande dessinée, sans parler de la place prépondérante qu’occupe l’illustration dans ses pages : une surprise, là où l’on aurait pu attendre une toute-puissance de la photographie.

Un art accessible

La BD, justement, a connu sa propre révolution dans les années 90, lorsque les maisons dites indépendantes ont rencontré le grand public. L’un des événements déclencheurs de ce mouvement fut la fondation de l’Association (maison d’édition de BD) par les auteurs Lewis Trondheim et David B. qui cherchaient à promouvoir une bande dessinée “d’auteur”. C’est notamment Marjane Satrapi qui leur ouvrit grand le marché, avec le succès de “Persepolis”. Depuis, les blogs de dessinateurs fleurissent, permettant à certains d’entre eux de trouver une audience croissante, et parfois la voie du succès. Si l’on ausculte les raisons de ce mouvement massif qui fait son chemin vers le grand public, on obtient une foule de réponses. En art, la première est sans doute économique. « Je voulais créer une foire alternative qui permette à des amateurs d’art de démarrer une collection, et le dessin m’a paru le bon medium, explique Christine Phal. On peut acheter un dessin d’art pour 300 euros, c’est très accessible. Si l’on veut acquérir l’oeuvre d’un grand artiste, ses dessins peuvent aussi être ce qu’il y a de moins cher. »

« Cela aussi, c’est en train de changer, confirme Bernard Moninot. Le fait d’acquérir est une démarche encore trop rare en France. » C’est aussi accessible pour les artistes : « Le moyen le plus rapide d’exprimer une idée artistique, c’est le dessin. Et puis pour dessiner, on peut être nomade, pas besoin d’atelier, ni de gros moyens. » Le public semble répondre au caractère affectif de ce médium. « On a tous dessiné dans notre enfance », souligne Colette Barbier, directrice de la Fondation Ricard, pour expliquer l’affluence et l’enthousiasme que provoquent particulièrement les expositions de l’espace consacrées au dessin. C’est « immédiat », souvent « expressionniste, accessible visuellement, intime », précieux, car « contrairement aux multiples, aux tirages photographiques, un dessin est unique, lié à la présence du corps de l’artiste, à son travail physique », décrypte Bernard Moninot.

Une pratique à part entière

Il y a même, selon lui, une forme de vérité du dessin : « On perçoit une autre forme d’information. Imaginez que Marjane Satrapi a réussi à intéresser des millions de gens à la révolution en Iran à travers sa vérité. La photographie n’aurait pas permis cela. » Le dessin, enfin, est « originel, il a précédé les mots. Les hommes ont utilisé le dessin pour symboliser les épreuves auxquelles ils étaient confrontés, la mort, le combat… » Et puis, peut-être, le caractère souvent figuratif du dessin le rend plus séduisant et plus compréhensible qu’une installation conceptuelle.

Le dessin contemporain est le terrain de jeu d’une véritable innovation par les artistes. « Le dessin était, au départ, un travail préparatoire pour d’autres oeuvres, rappelle Christine Phal. C’est vrai pour les sculpteurs, les peintres, les cinéastes, les créateurs de mode. » On peut d’ailleurs admirer cet aspect du travail dans l’exposition “Histoire de carnets” proposée par le salon et qui présente croquis, story-boards et esquisses de tous les horizons artistiques. « C’est dans les années 60-70 que le dessin est devenu un medium autonome, une pratique à part entière, à peu près avec la naissance de l’art dit contemporain », rappelle Johana Carrier. L’exposition “Lignes de chance”, à la Fondation Ricard, propose le travail de 26 jeunes artistes, pas ou peu connus, tous formés aux Beaux-Arts de Paris, et qui « s’emparent de la réalité pour renouveler le dessin », s’enthousiasme Bernard Moninot, qui a co-sélectionné les travaux. Sa pratique d’artiste montre bien ce dont il parle : le dessin, dans ses oeuvres, est souvent provoqué par des jeux d’ombres, des fils ou des câbles tendus, des effets d’optique. Pour lui, le dessin est partout ! Les jeunes gens de “Lignes de chance” sortent eux aussi de la feuille de papier : dessin et vidéo, projection de dessin sur l’eau, dessin animé, illustrations où l’absurde flirte avec la poésie, dessin sur des écrans de télévision, sur des bâtons, dans une sculpture faite de lignes, dessins sur le mur… La séduction et la grâce qui se dégagent de l’ensemble de cette exposition montrent bien tout l’attrait de ce médium, dans son caractère contemporain. Alors, effet de mode ? Peut-être. Mais il se passe quelque chose du côté du dessin, et il serait dommage de passer à côté !

Communiqué de presse de songeur |Proposé le 1 avril 2010 |Commenter...

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